Jeremie NOËL

Photos et récits de voyages

Douane

Swaziland : le passage de la frontière à Bulembu

Comment j'ai failli passer la nuit dans le no man's land entre l'Afrique du Sud et le Swaziland à cause d'un pneu crevé et d'un douanier pas très flexible...

Pour rallier le Swaziland depuis les environs du Parc Kruger, une longue journée de transition nous attend. Après une première partie de trajet longue mais sans histoire, nous faisons une courte étape à Barberton, ancienne cité minière mignonette. C’est pour moi l’occasion de me faire alpaguer par une sud-africaine ivre et réjouie à la sortie du pub local qui tente de me persuader de l’emmener voir la Tour Eiffel. Il est 15h… La route entre Barberton et Bulembu Le Swaziland étant un état enclavé indépendant, il faut y entrer par l’un des postes frontière répartis tout autour du pays. Comme nous arrivons du nord, le plus simple (et le plus beau) est d’entrer par Bulembu, seulement, la frontière ferme à 16h. Il nous reste donc 40 km à couvrir en une heure. Ca devrait être jouable. Paysage sur la route entre Barberton et Bulembu - Afrique du Sud C’était sans compter sur l’entreprise générale de rénovation des routes à laquelle semble s’adonner tout le nord du pays. Du coup, les 25 derniers kilomètres sont de la piste couverte de gravats, parfois même en circulation alternée… nous avançons très lentement et commençons à nous inquiéter de ne pas arriver à temps à la douane. Un quart d’heure avant la fermeture, il ne nous reste que 3 km. On respire, ça va être bon. La route étant plutôt en meilleur état, j'en profite pour accélérer. Mais derrière un virage un peu serré et sans visibilité, la route se transforme en champ de cailloux. Nous arrivons beaucoup trop vite et l’un des pneus explose littéralement. Impossible d’aller plus loin. Le temps de commencer à nous lamenter, 5 ouvriers se jettent spontanément sur la voiture et nous changent le pneu en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. On se croirait à un pit stop de F1. Dix minutes après, nous pouvons repartir. En gage de reconnaissance, nous offrons à nos sauveurs une tablette de chocolat qui les met dans un état d’enthousiasme étonnant. Nous couvrons les 3 km restant le plus vite possible et il est finalement 16h01 quand nous atteignons le côté sud-africain de la frontière. Ils nous laissent passer en nous enjoignant de nous dépêcher. Trois minutes plus tard, nous arrivons du côté swazi de la frontière… fermé ! La barrière est baissée, la grille est close, cadenassée. Tout ça pour ça. Barrière fermée au poste frontière de Bulembu, au Swaziland L'enfer, c'est le fonctionnaire des douanes ! Refusant de nous recogner cent bornes de piste sans nous être un peu battus, je vais négocier avec le vieil employé des douanes, irascible et très imbu de sa fonction. Fonctionnaire africain à lunettes plus vrai que nature, il oppose à nos supplications son sens de la droiture, et la masse de travail qu’il doit accomplir avant le lendemain (il agite avec gravité les sept malheureuses factures de 50 rands qu’il doit traiter pour la journée). A chaque nouvel argument déployé, il secoue la tête et scande « not my problem, not my problem ». Nous réprimons notre désir soudain de l’occire en l’étouffant avec son livre de comptes et lui proposons en dernier recours de payer un « late fee ». Après avoir semblé un temps curieux de la somme que nous sommes prêts à lui offrir, il s’énerve et nous explique qu’il est incorruptible. Devant cet échec cuisant, nous pensons que c’est fini, que nous allons passer la nuit dans le no man’s land entre le Swaziland et l’Afrique du Sud… Finalement, mon amie tente sa chance avec Bob le douanier. En vingt secondes, elle obtient l’ouverture de la barrière sans condition… Ce qui s’est passé au cours de ces vingt secondes, personne ne le saura. Nous rentrons donc au Swaziland après vingt-cinq minutes de pourparlers, non sans une dernière remarque de notre ami sur le retard qu’il a pris sur le traitement de ses factures. Bon vent, mon vieux ! Une piste pénible mais un paysage magnifique Croyez-vous qu’on serait au bout de nos peines ? Que nenni, les 18 derniers km au Swaziland (entre Bulembu et Piggs Peak) sont pires encore… De la piste sur laquelle on ne peut dépasser le 25 km/h. Avec la fatigue qui commence à s’accumuler, ça devient vraiment dur. Heureusement, le paysage, au crépuscule, est saisissant. Terre ocre qui déteint sur les premiers mètres des forêts d’eucalyptus par ailleurs d’un vert éclatant, ciel opalescent et lumière rasante : les couleurs explosent et la route qui serpente dans les montagnes est sublime. Forêt d'eucalyptus sur la piste qui relie Bulembu à Piggs Peak - Swaziland Finalement, entre Barberton et Piggs Peak, nous aurons mis trois heures à faire 60 km !! Enfin, après nous être perdus dans la nuit à Mbabane, nous trouvons une gentille autochtone pour nous escorter jusqu’à la route de l’Ematjeni Guest House et nous arrivons éreintés dans une superbe maison perchée sur les hauteurs de la ville. Photos Afrique du Sud Itinéraire Afrique du Sud


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